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petit grincement de dents de rat et il y eut un peu de sang sur la poussière.

— Pourquoi l’as-tu tuée ? dit Louise fronçant les lèvres avec une moue.

— Parce qu’elle te faisait peur… moi je ne les déteste pas, les chauves-souris, répondit-il, livrant tout son cœur dans ce naïf aveu d’homme tendre.

— Tu m’aimes donc bien ? interrogea-t-elle brusquement, l’arrêtant d’un élan spontané.

— Oh ! que oui, mignonne ! s’écria-t-il, et il la souleva du sol pour mieux lui baiser les yeux.

À ce tournant de la spirale obscure où un carrosse flanqué de dix cavaliers aurait pu dévaler sans encombre, de larges toiles d’araignées centenaires lambrissaient les murs. Des mascarons diaboliques se penchaient à chaque clef de voûte et il régnait un silence absolu. Par une meurtrière étroite on devinait l’orage épouvantable, et, un instant, une fulguration, mince comme une lame de couteau d’argent, se glissa jusqu’aux amoureux enlacés. Ils avaient, à présent, un bien autre vertige : maman Bartau en aurait frémi ! Le sac de Louise était allé rejoindre la chauve-souris. Son chapeau roulait tout seul dans la poussière. Louis, la tête perdue, ne voulait rien savoir.

— Ma robe ! ma robe neuve, suppliait-elle, se débattant.

— Je t’en achèterai une plus neuve ! mon amour !…

― Mais tu vas me décoiffer. Seigneur ! si on arrivait… Est-ce que cette concierge est encore loin ?… Oh ! je t’assure que tu es aussi fou que les deux sculpteurs ensemble ! Louis.