Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/22

Cette page n’a pas encore été corrigée

moi nous pâlissions sur des cartons du temps où les poules avaient des dents de sagesse ! Oui, ma petite mère, un massacre ! Des anachronismes de haut en bas !… Des saletés à rendre toutes nos brosses imberbes !… Et les architecs en auraient eu la danse de Saint-Guy !… Nom de nom ! Les copains n’en pouvaient plus ! Eh bien, ça se désosse, peu à peu !… Ça redevient un brave donjon, le cœur sur les murs !… Un coup de râpe à droite et une ciselure à gauche… nous voilà de notre époque. Enfoncés les ignorants et les gratte-pierres municipaux ! Gnia qu’un prince du vrai sang pour en faire faire du mauvais aux petits sous-préfetaillons de l’arrondissement ! Aussi ce que je le gobe, mon Mécène !

Et le sculpteur, enthousiasmé, s’enleva brusquement, à califourchon sur la barre d’appui d’un croisillon. Il ne se souciait guère de promener ce ménage à travers les escaliers et les galeries, mais, comme la petite femme était jolie dans son ingénue coiffure de blonde, il espérait les intéresser aux choses de la sculpture.

— Nous ne pouvons pas écouter ce Monsieur jusqu’à minuit, murmura Louis nerveux, si nous allions plus loin ?

— Il m’amuse, moi ! déclara Louise qui adorait ce genre de discours où les Batignolles se mêlent agréablement à l’utile.

— Mais tu ne le connais pas, il a l’air presque fou !

— Allons donc ! Un Parisien !…

— Merci pour eux ! Le vilain monde !

Louis finit par s’asseoir, mélancolique, tenant le sac de sa femme entre ses genoux.