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pas ouvrir les malles. Mais où iraient-ils ?… Est-ce qu’elle n’était plus mariée ? Est-ce qu’il allait remporter une demoiselle, alors qu’il venait chercher la saine tranquillité d’un ménage bien légitime ?…

— Ah çà ! mes enfants, bougonna-t-il, c’est bête !… nous ne nous entendons plus du tout. Puis, sentant, malgré sa torpeur, qu’on le méprisait chez ces richards sournois : Tonnerre de Dieu ! hurla-t-il, lançant son coup de poing contre la muraille, est-ce que vous fabriquez des cercueils dans votre sacré magasin ? Ma fille pleure et vous avez honte de ma misère !… C’est donc, bien sûr, que vous n’êtes pas heureux, puisque vous n’êtes pas bons et que vous ne savez plus rire ?

Louise se cachait dans sa poitrine. La servante accourue au bruit du coup de poing, avait les lèvres toutes tremblantes. Louis, très pâle, essayait de lutter encore, mais il devinait que l’émotion dompterait sa froideur.

Mme Bartau s’arma de toute son artillerie.

— Il n’y a pas besoin de mouiller des grands mouchoirs pour s’expliquer, monsieur Tranet, vous êtes un failli et cela ne s’efface pas sous les averses, mon cher monsieur. C’est trop commode de faire une noce à tout casser pour tomber des nues chez les gens raisonnables et leur crier : voilà mes trous, bouchez-les. Nous autres, nous n’avons jamais rien emprunté à personne, nous n’avons rien inventé non plus, ni le tonneau de luxe, ni le ciel de lit lumineux et breveté… nous avons taillé dans le bois brut, d’abord bien doucement pour ne pas éveiller les voisins, et ensuite à tour de maillet, au beau soleil, avec des raisons sociales véritables