te répéter que tu es libre, libre ! Tu opteras ou tu n’opteras pas, selon ta fantaisie, j’allais dire selon ta morale, seulement le mot est un peu gros pour toi. Éric, loge ceci dans ta mémoire : tu seras toujours libre.
— J’opterai ! hurla Paul crispant les poings.
— Soit, ne t’emballe pas. Je n’ai pas l’intention de t’en empêcher… Occupons-nous plutôt de Mademoiselle Jane Monvel.
— Ah ! oui, murmura Paul agacé, encore une femme qui va me cramponner. Elle est charmante, cependant c’est bien excessif de sa part de s’être abandonnée aussi rapidement. Qu’en penses-tu !
— Moi, je ne pense rien. Je t’admire !
— Tu te fiches de moi, hein ! Reutler, Reutler, je t’ai déjà averti : je n’aime pas qu’on le prenne de trop haut…
— Du calme, Don Juan !
Imperturbable, Reutler fumait.
— J’ai peur de ce qui monte en moi contre toi, gronda sourdement le jeune homme, se raidissant sous la pression affectueuse du bras de son aîné.
— Cela doit venir… comme le reste !
— Elle a peut-être raison, Madame de Crossac, tu me méprises, Reutler !
— On ne méprise jamais son sang.
Alors, l’infernale idée du cadet se fit jour.
— Ton sang ? s’exclama-t-il. Tu es un caractère allemand et moi je suis un caractère français. Entends-tu ! Nous avons beau être frères…
— Nous n’en sommes pas moins ennemis, acheva le baron de Fertzen, dont la voix mesurée devint très basse.