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feu a pris dans un rideau, dis ce que tu voudras et fais servir des coupes de champagne. Va vite. Je vais essayer de me calmer, je te le promets, ma pauvre enfant.

Les deux femmes s’embrassèrent passionnément, comme on doit s’embrasser sur le pont d’un navire qui sombre, puis Jane s’éclipsa.

Alors, Geneviève se jeta au cou de Paul et la grande scène eut lieu. Scène déchirante, car la comtesse adorait le jeune homme. La resplendissante beauté de Paul était devenue son vice. Elle ne pouvait plus se passer de lui et, elle qui n’avait jamais été qu’honnêtement dépravée, se surprenait en des fougues d’érotisme capables de confondre même l’imagination de cette Diane, demeurée sentimentale jusqu’aux antres les plus obscurs de la forêt du rut.

Paul reçut le choc malicieusement. D’un geste gamin il lui montra leur silhouette, s’enlaçant dans la glace.

— Tu n’a pas honte ? Tu as l’air d’un homme gras !

— C’est ma foi vrai… qui serait plus petit, un peu plus petit que toi. (Elle rit et s’essuya les joues.) Va, je suis très belle, je te forcerai à m’applaudir, enfant terrible ! Voyons ! Là… Pour qui as-tu un caprice, avoue… je te le passerai, je te le jure !

— Pas de caprice, aucun caprice, sinon de te voir endosser un autre costume. Effroyable, cette mascarade ! Quand on pense que c’est pour séduire mon frère !