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crâne et savoir… S’il avait seulement la bonne idée d’en finir en la tuant ! Oui, cette maison est une maison de cristal, tout y est fragile… moi aussi, j’ai la fêlure, et je vais me briser, me briser irréparablement…

Reutler s’affaissa sur un canapé, enfonça sa tête dans une soierie japonaise dont les chimères d’or lui meurtrirent la face.

Une heure de silence passa, lourde, morte, et au milieu de cette agonie un éclat de rire sonna. Cela tomba d’en haut, des appartements qu’habitait Marie, la servante-maîtresse ayant quitté la chambre où régnait le portrait du maître.

Ce rire, un beau rire de triomphe, semblait descendre des nuages. La verrière entière trembla et répondit par un écho harmonieux.

Comme tous les fauves aux aguets, Reutler possédait une ouïe très fine ; il perçut, avec le son de sa gaîté, le bruit des pieds souples du rieur, il l’entendit courir de la chambre de la jeune fille à la sienne, puis, Éric n’ayant pas trouvé celui qu’il cherchait, retraversa des salons, s’arrêta, sans doute devant une glace pour refaire le pli de sa stuart, s’enfuit, et le rire sonna de nouveau, sur le perron du ciel, descendit le long de la galerie extérieure, tournoya comme le vol d’un oiseau, s’abattit enfin sur la verrière parmi les grappes de glycine.

Reutler se dressa, le cœur dilaté. Il le voyait et il ouvrit les bras.

Le jeune homme portait ce costume sobre très digne, très anglais qu’il avait adopté pour son nouveau masque de séducteur. Sa tête blonde resplendissait sur sa silhouette sombre avec une telle