Page:Rachilde - Les Hors nature, 1897.djvu/353

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Monstrueux ! pensa-t-il, songeant tout à coup que cette pauvre fille l’aimait.

Elle rangea les nappes dans une armoire et toussa légèrement.

— Monsieur le baron, fit-elle, anxieuse, j’ai besoin de vous parler… avez-vous le temps ?

Cela se trouvait fort bien et simplifiait les préambules. Il se retourna…

— Quoi, Marie ? dit-il le regard vague.

— Il s’agit de Monsieur Paul. C’est fini de jouer vous comprenez ?…

Elle disait tout de suite ses pensées, elle, très nettement.

— Non ! Je ne saisis pas du tout…

Elle frottait le parquet du pied, embarrassée, et elle étudiait le dessin du tapis pour ne pas rougir sous son regard. Elle se pencha. Qu’est-ce qu’elle voyait donc ? On aurait dit une forme, un corps étendu ; elle souleva le bord, demeura pétrifiée ; du sang coulait…

— Monsieur Reutler… Oh ! du sang !

Le cri fut si déchirant que Reutler eut froid jusqu’au fond de l’âme. Elle reculait, éperdue, la bouche ouverte, les bras en l’air.

— Vous avez tué votre frère, hurla-t-elle. Ils le disaient bien, aux cuisines, que vous le tueriez…

Reutler partit d’un éclat de rire qui sonna très faux, comme un écho de celui de Paul.

— Pauvre petite folle ! C’est mon chien que j’ai tué et il le méritait, il a étranglé le prince Mes-Yeux ! Éric n’a pas su le corriger, lui, et moi j’ai été… trop vif ! Appelez Jorgon, pour qu’on débarrasse le plancher, j’avais oublié cet incident. Ne