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VIII

Il prenait goût à ce jeu et se faisait humble. C’était un impossible séduisant, cette fille brune, si froide, que rien n’arrivait à distraire de sa passion mystérieuse. Elle aimait Reutler uniquement et elle ne se révoltait pas du rôle effroyable qu’on lui imposait. Elle ne se révoltait que sous les caresses. Qu’espérait-elle ? Il fallait le savoir ! Blotti dans ses jupes, il la regardait inquiet, très lâche, se sentant des envies de prier. Puisqu’on ne lui permettait plus que cette espèce de petit groom, ce dernier petit morceau de plaisir, il essayerait de s’en contenter, mais la féale avait des idées très nettes sur les droits de son seigneur. Ce jour-là, elle le repoussa si brutalement qu’elle le fit s’étaler dans le tapis de fourrure blanche qu’ils avaient choisi ensemble pour éclairer leur chambre de jeunes filles. Il y demeura étendu, les yeux clos.

— Ça finira mal, dit-il d’un ton las, je vous violerai, Marie !

— Vous vantez pas ! répliqua-t-elle cassant son fil entre ses dents pointues.

Elle cousait toujours, en femme qui n’a plus rien à faire. Elle montrait des dents éblouissantes, des ongles soignés, se poudrait, se parfumait selon les indications perverses du bel initiateur, et dès que Reutler paraissait, elle courait au miroir, oubliant la présence de Paul.

— Aimable serpent ! D’ailleurs, tu as raison !…