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Les rires s’accentuèrent. Le terrible garçon ajouta, offrant péremptoirement son bras :

— Oserais-je, Madame, vous prier de m’introduire dans les coulisses ? je brûle du désir de lui être présenté. De notre temps, ce sont les anonymes qui font la réputation de ceux qui tiennent à signer !

— Quel mauvais sujet vous devenez, Monsieur de Fertzen, répliqua la comtesse, posant son bras tremblant sur celui qu’on lui offrait. Si vous n’étiez pas encore un enfant, je me fâcherais tout rouge. Allons ! je vais vous confier le nom de l’auteur, pour vous épargner de pires étourderies, sous le sceau du secret, par exemple… (D’un geste vif qui essayait de nier la quarantaine, elle ouvrit son éventail et se pencha.) Paul, prononça-t-elle à voix basse, dans ma chambre, par le chemin que tu connais. Tu gratteras deux fois, selon l’habitude. Jane t’ouvrira et nous nous expliquerons, pendant que je passerai mon costume. Moi, je suis obligée de faire ma ronde.

Paul hocha la tête d’un air convaincu.

— Oh ! déclara-t-il, tout haut, voilà un pseudonyme transparent ! Je vous remercie, Madame, de me mettre sur la bonne piste.

Et s’inclinant, il abandonna la place, faisant semblant d’aller rejoindre le comte de Crossac qui causait avec son frère.

Le mari estimait fort le baron Reutler, ce grand grave dont les périphrases lentes avaient l’air de prendre des précautions oratoires pour la calvitie de son interlocuteur. On causait chimie des heures entières, front à front, hors du monde ; et pour le