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— Cette bêtise ! Vous la faisiez coucher dans mon cabinet de toilette et elle prenait des libertés inouïes ! Ne voulait-elle pas m’administrer des potions calmantes et me passer mes robes de chambre ? J’ai reçu des gifles (j’adore les coups, moi) mais je sais qu’elle a les seins fermes, une taille exquise, fondante et souple, la peau brune, une de ces peaux créoles… par exemple, un petit défaut… Dois-je continuer ?

— Taisez-vous ! gronda Reutler serrant les poings.

— Continuons… elle a un grand défaut : elle vous aime !

— Ah ! la pauvre folle ! Elle a essayé de se sauver en vous avouant cela ?

— Elle n’a rien avoué du tout, cher ami. Son Secret se lit sur sa figure quand elle parle de vous. Alors elle devient belle et, sacredieu, ce qu’elle abuse de ce genre de beauté ! (Paul jeta son cigare d’un mouvement de dépit.) Enfin, je vous la rends intacte…

— Merci… je n’aurai sans doute pas attendu la permission… de votre part.

— Elle vous adore…

— Éric, dit très doucement Reutler, que me voulez-vous ? je m’y perds…

Et il se croisa les bras.

Paul scanda ses phrases :

— Elle vous adore et elle m’exècre. Plus elle est complaisante et plus je sens croître sa haine. J’ai pris feu parce qu’elle ne m’aime pas… encore un impossible qui me tente. Il faudrait que vous eussiez l’obligeance de peser un peu sur sa jeune volonté, vous le volontaire, pour qu’elle m’obéisse. Elle n’aura