Page:Rachilde - Les Hors nature, 1897.djvu/303

Cette page n’a pas encore été corrigée

çant à vous révéler cela. Je ne dois pas vivre longtemps, alors, laissez-moi vivre en paix ; je vous jure que je possède toute la bravoure qu’il faut… pour mourir.

Tous eurent un mouvement de pitié et se levèrent, les larmes aux yeux.

Ce diable de Lunel chauffait la poitrine. Le forgeron, spontanément, lui serra les mains à les lui briser. Voilà donc pourquoi on le choyait tant ! C’était là le secret des loups-garous !

— Pauvre Monsieur Paul, dit-il ému, c’est pas possible, Dieu de Dieu ! Y a toujours de l’espoir ! Tonnerre ! que je puisse pas vous flanquer une pinte de mon sang dans les veines !…

Paul pouffa derrière son éventail.

Joviot prit Reutler à part :

— … Toujours de l’espoir quand on est jeune, affirma-t-il.

— Aucun, déclara nettement Reutler dont le regard flambait.

Maintenant, on lui dictait ses répliques ! Quelle épouvantable comédie et comme ils sont tous gens de théâtre, ces spéciaux tentateurs, inlassables dans leurs perpétuels changements à vue… Oh ! oui, le tuer, dès qu’on le prendrait en flagrant délit de tentation plus directe… s’en débarrasser… Reutler, pour s’étourdir, fit des dons au village.

Il donna des pompes, il donna des costumes et il nomma même un capitaine.

— Tenez, ce brave garçon qui a démoli le toit ? Qu’en pensez-vous, Messieurs ?…

Le forgeron devint cramoisi et on le salua d’une acclamation unanime. On prévoyait déjà qu’au re-