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— Regarde, Coco ! Je suis un paon, je suis un prince Mes-Yeux, mais je suis le plus beau ! N’est ce pas, Coco, que tu es jaloux parce que je suis le plus beau ? Regarde-moi bien !

Et d’un coup sec du poignet, avec une habileté toute féminine, il déploya l’éventail derrière sa tête dans un si beau geste de grâce que l’oiseau, par esprit d’imitation, fit la roue. On entendit le bruit de la détente soyeuse de toutes ses plumes, et, sur la splendeur des émeraudes en fusion, le soleil répandit sa pluie d’or, pendant que Paul renversait la tête sur le satin vert de l’éventail où ses cheveux mirent du jour.

— Il me rendra fou ! songea Reutler.

— Hein, fit Paul triomphant, quel est le plus sot de nous trois ?

— … Lui donner des gifles, pensait l’aîné, je crois le moment venu… et je ne peux pas… je crois que, désormais, c’est la seule chose que je ne puisse plus faire !

Il répondit tout haut :

— La nature ne devrait pas se tromper.

— Merci ! dit Éric, saisissant l’oiseau qu’il envoya tourbillonner dans l’espace. Tiens, Reutler, vois-le qui recommence là-bas pour ses paonnes… un dérivatif à ses colères ! Il est idiot, cet oiseau.

Paul s’assit sur la balustrade, se prit le pied, continua du même ton détaché :

— As-tu des nouvelles de la petite servante ? On ne la rencontre plus ? Est-elle partie ? Est-elle arrêtée ? Les journaux de la localité se sont-ils mis en frais d’un fait divers pour elle ? Réponds, mon