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me peigner, j’aurai des poux… et puisque je n’en ai pas encore…

On se tordit. Jorgon consulté grogna, prétendant que ces histoires de femme ne l’intéressaient pas, lui, un vieillard… Et puis, lui aussi, redoutait les accidents. Il servait son jeune maître plus particulièrement que tout le monde.

— Voyez-vous, Françoise, grommela-t-il roulant des yeux terrifiés, que moi qui peigne Monsieur Paul, je lui donne… Non je ne prête pas le mien !

Il n’acheva pas, car il chancelait sur ses pauvres jambes.

— Qu’elle s’en procure un au village. Défense de toucher aux nôtres ! cria-t-il hors de lui.

La cuisinière s’arrangea de façon à ce qu’on oubliât la modeste commission et Marie refusa de sortir.

Un matin que le second valet de chambré était venu chercher dans les cuisines un certain charbon destiné au creuset de l’observatoire, Marie prit un petit panier, le remplit des morceaux les plus réguliers, selon l’ordre, et elle remonta, le cœur dilaté. D’instinct, elle s’orienta, trouva la route, la grande spire de chêne sculpté aux marches ouatées de tapis turcs, elle monta, elle monta, tout enfiévrée d’une joie inexplicable, et elle finit par pousser la trappe de ses poings, de son front, l’ouvrit victorieusement, se glissa dans la chambre des mystères.

Reutler calculait, assis devant son bureau. Absorbé par ses chiffres, il n’entendit rien. Marie vit le fourneau et son creuset. Elle ne s’étonna pas de ce que cet homme faisait cuire. Le creuset contenait une mixture brillante, très jaune, un étrange bouil-