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Elle aurait bien voulu se peigner par exemple, car elle avait encore des épines dans les cheveux. Elle dénoua ses nattes, vint tâter la baignoire. C’était chaud, ce serait bon, elle poussa un profond soupir et se déshabilla.

Derrière la porte, à tour de rôle, risquant l’œil à une fente qu’ils connaissaient de longue date, ils la violèrent. Oh ! très correctement et très froidement, en gens blasés qui peuvent s’offrir mieux.

— M’en doutais, n’a pas de chemise ! fit le groom dégoûté.

— Crevant ! affirma un garçon d’écurie.

— Un peu maigre, la croupe ! objecta le second.

— Les seins pas en forme ! dit le troisième.

Le valet de chambre la trouva beaucoup trop brune.

Mais le cocher lui découvrit des attaches fines. Et il ajouta :

— On s’en offrirait tout de même une tranche !

Le groom le pinça, brusquement, avec une furie extraordinaire.

— Cochon ! s’exclama Célestin, oubliant la voix de tête qu’il affectait.

Les rires montèrent tellement que la fille se tourna épouvantée. Elle écouta, le front bas, les yeux grands ouverts et lumineux, très tragique dans sa pose de fauve traqué par la meute. D’un geste, elle ramena l’ample manteau de ses cheveux, puis elle attendit.

Un silence régna. Du fond de la cuisine, Françoise eut une idée géniale pour amuser les gosses qui ne riaient plus.