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Tout soudainement, la nuit se fit. Ce n’étaient pas les lampes discrètes qui s’éteignaient ni la féerie des lustres. Un long corps souple venait de glisser de la loge d’à côté dans celle du prince. Un joyeux farceur introduisait la fantaisie dans leur triste aventure, projetait le bal masqué au milieu du salon officiel. Un brutal, celui-là, qui se trompait, recueillant les applaudissements délirants de tous les gens ivres des troisièmes galeries et du parterre. Le temple des luxures flambait. Il ne restait plus que les fêtards solides, jeunes assez pour aimer le ridicule de se casser les reins en public. La prunelle morne du prince s’alluma.

Malgré sa robe encombrante, la lourdeur de ses parures, l’impératrice de Byzance, oubliant sa majesté, et, d’ailleurs, n’ayant pu forcer la porte que les ouvreuses refusaient d’ouvrir, même pour tout l’or de sa jupe, la princesse de Byzance se résignait à l’acrobatie : elle entrait par la fenêtre.

En trois rétablissements elle eut le pied sur une cariatide et se dressa sur le rebord velouté du balcon, où elle abattit les écrans de tout son poids.

Là, debout, triomphante, elle adressa des baisers aux spectateurs.

Madame de Crossac se leva.

Le prince Stani, pétrifié, demeura tranquillement assis…

Cette grande jeune femme rousse allait-elle continuer son voyage aérien ou pénétrer ? Original incident !

Paul riait toujours, de son rire normal. Il entra.

— À la bonne heure ! Cette belle personne est grise comme un ange ! pensa le Slave.