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Elles s’égratignèrent, se tirèrent les cheveux, mais en souriant et dans des poses plastiques. Elles n’étaient pas au théâtre, pourtant elles avaient toutes trois endossé le sourire et les gestes de grâce avec le costume, il le fallait bien. Sans cela, comment s’y reconnaître, si on prenait l’habitude de se négliger en jupe bouffante ! Elles dirent chacune des petites paroles obscènes affreuses, et si délicatement que Paul crut au pépiement d’un moineau en colère.

— Je crois, murmura-t-il très rêveur, qu’il est plus difficile qu’on ne pense d’entrer dans les ordres !

Et il assujettit son masque.

Il fallut refaire la paix. Princièrement, Paul distribua les baisers. La plus sévère impartialité présida, du reste, à cette distribution, bien qu’il eût un caprice pour la plus petite, et toutes quatre, les trois danseuses portant la traîne d’or de l’impératrice de Byzance, elles firent une irruption solennelle aux premières loges.

Paul leur ouvrit la porte, s’effaça.

En monôme, leurs petits bras sur leurs épaules, elles entrèrent, se balançant, dans la cage du lion, et Paul s’éloigna, avec un rire nerveux, une gaîté convulsive où il y avait l’ivresse, et, sans doute, le regret de les donner, toutes trois si jolies et si roses, à ce grand homme noir qui ne saurait pas s’en servir.