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I

Devant l’immense glace qui, dressée d’un bout à l’autre de la muraille, paraissait envahir la pièce comme un fleuve silencieux et y noyer à jamais la réalité des choses, Paul-Éric de Fertzen s’habillait. Des réflecteurs d’argent rabattaient sur son beau visage les rayons aveuglants de corolles électriques toutes blanches, gerbe de lis glorieux, dont la lumière cruellement froide le magnifiait d’une pure apothéose. Svelte, souple, le très jeune homme se contemplait, de profil, dans une féline torsion de buste faisant saillir sa hanche, et avec des gestes lents, des étirements calculés de bras, il allait à la rencontre de son double. La tête renversée, les yeux mi-clos et frémissants d’un voluptueux clappement de paupières, se buvant, s’enivrant de lui-même, il élevait, haut, en arrière, sa face pâlie d’orgueil, où les deux taches noires formées par l’ombre des narines, petites