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— Je suis Agrius, le Romain.

Cette réponse fit sourire Harog.

— Tu étais Romain avant d’être Gaulois ?

— Ma famille vient de plus loin que vous tous !

Il se drapait dans les plis d’un manteau dont le galon révélait quelques traces de pourpre.

— Dis plutôt, Agrius, que tu as tué tes anciens maîtres. Du temps de ton esclavage tu t’appelais Boson, Boson-le-Boucher.

— Et tu as encore le sang de ta famille sur ton manteau ! ajouta Ragna, lui frappant l’épaule d’un coup qui le plia en deux.

— Que je puisse être un homme, je n’en demande pas davantage, grommela le meurtrier, jetant un regard hostile au berger. Puisque vous connaissez ma misère, vous savez aussi que ces nobles Romains, mes anciens maîtres, m’ont mis dans un four pour me punir d’avoir dérobé des fruits. J’en ai conservé la peau que vous me voyez, jaune comme l’huile rance, mais si desséchée qu’elle s’écaille dès qu’on la frotte. Je serai votre serviteur à la condition que vous me donnerez du sang à boire, voilà ! J’ai toujours soif.

Une rumeur éclata. Les mendiants se mirent à parler tous ensemble :

— Nous ne demandons point de sang !… Du vin