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rayons de la roue des fleurs, côté des lys, et disparut en courant.

Les travailleurs rentraient à la ferme dans le crépuscule violet, l’heure de leur dîner sonnant un peu après le repas de leur chef, et des réfectoires s’allumaient au fond des vastes granges. Le pays se divisait en sections très nettement dessinées sur la terre comme sur une immense carte géographique. Il y avait les plants-fleurs, les plants-fruits, les plants-légumes, les plants-céréales et les plants-vierges, ceux-ci restant à fertiliser, les plus proches de l’épaisse muraille de la forêt. Là, c’était encore la nuit, même au jour, car on ignorait si, plus tard, le gouvernement détruirait son mur personnel pour aller creuser davantage dans les derniers remparts de la nature. Entre la grande forêt meurtrie, amputée de toute une moitié de corps, et le fleuve coulant mystérieusement derrière le rideau de peupliers, le fleuve devenu noir inexplicablement, des cultures se développaient à leur aise, produisant d’années en années des résultats phénoménaux.

Marguerite marchait vite, gracieuse silhouette blanche papillonnant le long des haies. Elle rencontrait un ouvrier, sa bêche sur l’épaule ou son