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— Comme vous me dites cela, mademoiselle Davenel ? Vous avez en ce moment la mine d’une névrosée. Vous me feriez peur si j’étais capable de vous souhaiter votre fête avec n’importe quel bouquet, mais je suis venu ici pour manger à ma faim, une fois encore… pas pour autre chose, ma petite bourgeoise.

Cette injure fut proférée très doucement.

Les bonnes arrivaient rapportant sur un signe de Mlle Davenel des plats qu’on avait déjà offerts au ministre. Un peu étonnée, Pauline, la femme de chambre, dit d’un accent dédaigneux :

— Faut-il redemander de la glace ? Monsieur le directeur nous a bien recommandé de la ménager.

Et vraiment, pour ce bizarre personnage dont les vêtements pendaient en loques, dont les doigts étaient noirs, dont les cheveux se souillaient de la boue dans laquelle il aimait à se coucher, on ne voudrait pas perdre une goutte de fraîcheur. À quoi bon rafraîchir cet enfer ?

— Pas de glace, Pauline, mais allez prendre aux caves une bouteille de champagne sec, car celle-ci est entamée. Vous oubliez que Monsieur ne boit jamais d’eau !

L’anarchiste ferma un instant les yeux.