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épines courtes, acérées, un peu méchantes, aux fleurs gracieuses rouge foncé ou panachées de deux nuances, blanc et carmin ; le rosier de l’Orient, couvrant des mètres de terrain d’une verdure épaisse qui sent aussi bon que sa fleur splendide rose ardent.

Enfin toute la série des roses naines, taillées en petites haies vives, près de terre, jonchant le sable de leurs pétales multicolores.

Les allées sablées de sable fin, miroitant, couraient, capricieuses, sous les bosquets et les tonnelles. Il y avait des perspectives étranges de rosiers francs, alignés comme au port d’armes, puis des lointains de forêts vierges faites de branches de roses moussues, inextricablement enlacées dans un désordre fou, un écroulement de fleurs pesantes, tombant les unes sur les autres, ivres de rosée. Des coins d’ombre délicieux s’émaillant de taches pourpres comme si le sang de toutes ces fleurs finissait par couler.

Et la maisonnette du père Brifaut, modestement coiffée de chaume, se dissimulait derrière ces splendeurs, une maisonnette basse avec une unique fenêtre dont les vitres étaient voilées de toiles d’araignées, ayant un aspect de pauvreté qui serrait le cœur.

Les enfants ne bougeaient pas, retenant leur souffle ; Mary savait combien le père Brifaut était sévère lors de ces événements-là. Siroco, l’aide-jardinier, avait la mine anxieuse d’un petit homme qui a mis du sien dans l’affaire. L’Émotion[1], une nouvelle

  1. Cette rose existe en réalité.