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constellés de perles de couleurs, c’étaient les joies de l’amour volées à des femmes ou rajustées pour une femme. Éliante avait porté tout cela ; et ses mains, devenant fiévreuses, il les plongeait sensuellement dans ce torrent de choses douces qui lui chatouillaient les paumes. Il y avait des jupes en lourd lainage et des culottes en damas filigrané, des chemisettes de soie légère comme des nuées, des ceintures énormes, damasquinées et bossuées de gemmes. Les jeunes filles ne finissaient point de s’extasier. Missie avait les yeux hors de la tête, et la madone, Mlle Fréhel, perdant sa gravité d’artiste, s’asseyait par terre pour mieux manier et soupeser les broderies.

— Allons, Mesdemoiselles, que l’on déplie les paravents et que l’on se déguise. Il faut essayer mes robes.

Ce fut un délire. La joyeuse gamine et la sérieuse madone se précipitèrent, celle-ci sur un brillant costume turc or et bleu, celle-là sur une ample robe japonaise à ramages d’argent sur fond vert. Derrière les paravents, on entendit cliqueter les agrafes de métal et se froisser les satins. Une odeur de fraîches femmes coquettes se mélangeait aux dernières vapeurs sucrées de la collation.

Mais plus haute, bien plus haute se dégageait