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chair veloutée. Il voit des choses menteuses. D’abord sa propre face qui le trompe, car elle rit, au milieu des rides transparentes de l’éternelle jeunesse de la mer et Rohild ne rit jamais, c’est un homme grave, un taciturne pêcheur de poissons ; puis, au fond de ce lait mousseux, éternellement jaillissant de mamelles inconnues, des êtres singuliers passent, armés d’armes terribles, prêts au prochain combat, fantômes de chevaux cornus, ou silhouettes de guerriers casqués de cuivre, pourtant créatures douces qui ne savent que refléter les lueurs tendres de la vague et celles plus vives des nuages ; Rohild s’est embarqué, par le printemps de ce jour hyperboréen, pour courir à l’aventure d’un meurtre, mais il n’a ni gaîté ni peur et reste calme, sans penser qu’il est, lui, plus jeune que la mer, plus nouveau que le printemps. La peur est un grelot de fausseté dans l’âme de l’homme ; elle le conduit aux actes déraisonnables. Rohild rirait s’il avait