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Il y a, en effet, une femme qui me tire par la manche.

Je m’arrête.

Elle aussi.

Il va falloir se dépêtrer, ce sera dur. Elle doit m’avoir entendu causer tout seul et me croit très ivre.

Droite, dans la ouate sale du brouillard, elle continue sa mélopée confidentielle. On jurerait qu’elle prie pour un agonisant. Elle ne rit plus et débite tous les psaumes. Les plus macabres fantaisies se joignent aux propositions les plus naïves. C’est le répertoire de deux heures du matin : celui des hommes saouls qui vont aux halles ou des vieux grands seigneurs perdus, après bal, devant leur propre hôtel.

J’ai tort de l’écouter puisque je le sais par cœur, mais le costume de cette fille me retient.

Son étroite robe de soie noire l’engaine drôlement, elle est maigre, la pauvre diablesse. Son corsage reluit de cabochons bizarres, aussi bizarres que ses propositions. Il est strié de métal et de strass comme une peau de serpent l’est d’écailles multicolores,