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des nuages. Un poudroiement de sable jaune vernit le pavé de bois. C’est l’heure des assassins. Je suis celui qui va tuer le rêve. Le vivre peut-être.

L’Orient ?… Il est en moi. Voici que je tourne dans le désert. Des palmes s’agitent, très haut, et les palmiers, en fût de colonnes lisses, ressemblent aux montants d’un vaste portique. (Ou ce sont les montants d’une porte cochère qui ressemblent à des palmiers…) On ne perçoit rien du bruit que font les larges pattes des autruches. Sur le seuil de la ville, morte depuis des siècles, des caravanes d’ombres se prosternent. Un violent parfum d’orange sature le vent tiède venu de l’oasis. Des femmes se cachent derrière une haie de cactus pour manger des fruits qu’elles ont volés aux hommes et elles dissimulent les pelures comme l’on déroberait des pièces jaunes. Elles rient.

Combien sont-elles de voleuses à la suite des caravanes d’ombres ?

Elles se moquent de moi. La plus effrontée m’appelle, me tire par la manche…

Je me réveille ahuri, je tombe de mon rêve et du haut du brouillard.