Page:Rachilde - L’heure sexuelle, 1900.djvu/132

Cette page n’a pas encore été corrigée

je pense tout haut devant elle, précisément parce qu’elle ne peut pas me comprendre.

Elle a un petit rire sec.

— Tu es maboul.

— Je te jure que non… j’essaye de me rapprocher de toi, puisque nous ne parlons pas la même langue.

— Bien possible. Veux-tu boire quelque chose : une menthe ou de la chartreuse ?

Je fais un geste de prière.

— Pas cela, dis, je bois tes yeux et ce poison me suffit, je t’assure.

— Espèce de dégoûté, mes verres sont propres. (Elle réfléchit.) Je les laverai devant toi, si tu veux. Je te dois une politesse.

J’ai envie de pleurer.

À trente-trois ans, c’est absurde. Comme c’est réel, ça me fait du bien de le constater, moi, le pauvre exilé de la vie, toujours dans le rêve et ne le distinguant plus de la réalité.

— Reine, puisque tu a besoin d’argent, pourquoi n’es-tu pas venue m’en demander… en sortant de l’hôpital ?

— Cette histoire ! Pour que tes larbins me foutent à la porte ! j’ai pas besoin de cham-