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penchais sur ces vieilles étoffes, j’entendis un bourdonnement très faible, qui, peu à peu, en l’écoutant attentivement, prit l’ampleur de cris entendus à une grande distance. Cela ressemblait aux paroles confuses d’un être se débattant contre un agresseur qui, lui, ne disait rien, accomplissait sans doute un métier sournois en la plus absolue des sécurités. Et plus j’écoutais, plus les sons prenaient la grandiloquence d’une imploration désespérée : « On tue quelqu’un ! Mais où ? » me dis-je ; puis me défiant de ma propre manie d’outrer, que je contrôle minute par minute de peur de laisser mon cerveau s’affaiblir en de vaines transes, je finis par démêler que ce qui venait de très loin devait être tout près, qu’une créature minuscule, un insecte devait être là, à la portée de ma main, prisonnier d’un ennemi qui lui laissait pourtant la permission de bourdonner son chant de mort… Et c’était vrai. Après avoir fait plusieurs fois le tour de la chambre, je découvris, dans un angle, une toile d’araignée (ce n’est pas ce qui manque chez moi)