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UNE AFFAIRE UBU


que l’auteur de la farce géniale est bien Charles M… et que cet M… que M. Chassé n’a pas nommément désigné, il le nommera, lui, qu’il s’appelle Gabriel-Charles Morin, qu’il naquit en Arles le 8 mai 1869 et qu’il commande actuellement, comme chef d’escadron, l’artillerie de la place de Brest.

Très bien. Toutefois, avant d’affirmer si énergiquement, M. André Thérive n’eût-il pas bien fait de se renseigner auprès des amis vivants de Jarry ; Jarry n’est point mort depuis si longtemps. Ce n’est pas Homère. Des poètes l’ont connu et précisément le prince des poètes, Paul Fort. Paul Fort nous a répondu tout de go :

— Je ne crois pas du tout à ces histoires. Voici dans quelles circonstances Ubu vint au monde. Nous étions trois amis d’Alfred Jarry, Charles Henry-Hirsch, Louis Ulmann et moi, qui le pressions de nous montrer cette pièce dont il parlait toujours. Il fallut aller chez lui, boulevard Saint-Germain, pour la voir. Nous nous trouvâmes en présence de cahiers d’écolier un peu vieillis déjà, et d’une écriture manifestement identique à celle de Jarry, quoique un peu plus jeune. Tout cela était