Page:Rachilde - À mort, 1886.djvu/260

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Vous savez… moi… je soupe ! mais je n’ai pas faim ! oh ! pas du tout faim !

On apercevait de ci, de là, un financier couvert de banqueroutes comme un brave peut l’être de blessures. Ces gens, gros de torse, à mains poilues, venaient pour faire des femmes… et n’avaient pas honte de le dire à demi-voix.

Le salon, d’un jaune clair, aux meubles capitonnés et déjà salis, scintillait d’or. Dans la tresse des étoffes, tapis, rideaux, draperies des portières, brillaient des filigranes d’or. Il coulait le long des murs comme, une sueur d’or… Un lustre électrique répandait une lumière exagérée sur tout ce jaune luisant.

Des plâtres nus, des terres cuites se dressaient aux embrasures, représentant des courtisanes, des bustes de célébrités politiques, et des tableaux ébauchés ou finis, accrochés à des chevalets de velours, révélaient les mystères du flirtage moderne.

On étouffait et on se le disait de temps en temps. Quelqu’un avait même découvert un mot peu spirituel : « Il fait chaud comme dans un four ! » — On se répétait ce mot en pouffant de rire.

Il y avait des dames qui, sortant du théâtre, en robes montantes, arrivaient pour demander à manger tout de suite, se tournant vers une table, se faisant servir, debout, et se dépêchant d’avaler de gros morceaux de brioche ! un coin de buffet de gare !…

Sous le rideau d’une embrasure, Desgriel et de