Page:Rabutin - Correspondance, t. 1, éd. Lalanne, 1858.djvu/60

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
40
CORRESPONDANCE DE BUSSY-RABUTIN.

bruit a couru qu’elle étoit dans un couvent, mais cela n’étoit pas vrai ; c’est à cette heure, où elle auroit bien besoin de cette dévotion que vous savez ; mais j’ai peur que cela ne fût pas assez fort pour lui donner la tranquillité qu’il lui faudroit sur le méchant état de ses affaires. Je ne doute pas qu’elle ne vous ait écrit sur tout cela et que vous n’en soyez aussi bien instruit que nous. Je vous assure que je suis fort aise de vous voir dépêtré de cette folle passion, qui vous a donné tant de mal : n’en parlons plus seulement, de peur de la réveiller.

Le roi est parti de Charleroi le 15. Il marche vers Arras, pour faire un siège ; mais de savoir de quel côté il tournera, c’est ce que personne ne peut deviner. Il fera apparemment tout ce qu’il voudra ; car il a une très-belle armée et les Espagnols sont très-foibles. La paix d’Angleterre n’est point faite, et le milord Saint-Alban partit hier pour aller trouver le roi. Il y en a qui disent que les Espagnols donnent Ostende aux Anglois, et que par ce moyen ils auront des troupes angloises pour pouvoir faire tête à la fin de la campagne. Peu de temps nous rendra savants. On dit tant de menteries qu’on ne sait que croire. Madame[1] s’est encore blessée cette fois, dont on est au désespoir.

46. — Bussy à madame de Fiesque.
À chaseu, ce 25 juin 1667.

Je suis bien plus aise, quand vous m’écrivez souvent, madame, que je ne suis fâché quand vous êtes longtemps sans m’écrire ; c’est que j’ai beaucoup plus de disposition à vous aimer qu’à vous haïr. Vous ne sauriez vous imagi-

  1. Henriette d’Angleterre venait de faire une fausse couche et « avoit pensé en mourir, » dit mademoiselle de Montpensier.