Page:Rabutin - Correspondance, t. 1, éd. Lalanne, 1858.djvu/59

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
39
1667. — JUIN

ami Coligny[1] ou par quelque autre, je vous prie de me les mander. Mandez-moi si notre grand ami…[2] augmente ce beau corps de volontaires ou s’il est à Ham. On dit ici les mêmes fadaises sur les desseins de guerre que l’on dit à Paris. Toute la différence, c’est qu’on les dit plus tard. Avec un peu de patience nous saurons toutes choses. Pour moi, je ne trouve rien de si fou que de vouloir deviner les entreprises, car on ne sait point d’ordinaire les forces ni les vues des entrepreneurs.

45. — La comtesse de Fiesque à Bussy.
À Paris, ce 20 juin 1667.

Nous revoilà donc en commerce réglé, monsieur, car je vous assure que je ne manquerai point de vous écrire aussi souvent que je le pourrai. Je suis ravie que vous preniez tout ceci comme vous faites. Vous êtes trop heureux de vous mettre l’esprit au-dessus de tout. C’est assurément nous-mêmes qui faisons notre bonheur : il y a longtemps que je l’éprouve par moi-même ; car, quoique ma fortune soit médiocre et que dans toutes les affaires que j’ai eues, j’aie essuyé mille chagrins, je n’ai pas laissé d’être gaillarde, comme celles qui en ont le plus de raisons[3]. Demeurons donc comme cela et nous moquons de tout. Il faut pourtant revenir voir vos amis cet hiver, et c’est ce que je vous conseille fort. La pauvre madame de Montglas auroit bien besoin de votre philosophie. Elle s’en est allée à *** dans le plus misérable état du monde. Le

  1. Le comte Jean de Coligny-Saligny, mort en 1686. Voy. Mémoires, t.  II, p. 152, 210 et suiv., et plus haut, p. 31.
  2. Probablement le comte de Gramont.
  3. Madame de Fiesque était « salée dans sa folie, » dit madame de Sévigné.