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1667. — MAI

dépens mêmes de ma vie, me la laisse passer si inutilement pour son service, tandis que cent mille gens qui ne sont pas si zélés que moi vont avoir l’honneur de le servir ?

À la dernière lettre que je vous écrivis, vous me fîtes réponse que vous la feriez voir au roi. Vous puis-je demander ce qu’il a dit, monsieur ? Ne marchandez pas, s’il vous plaît, à me le mander. Je vous assure que toutes ses froideurs pour moi ne m’ôtent pas une fort grande chaleur que j’ai pour sa gloire et pour sa personne. Vous le savez bien, et je suis persuadé que les tendresses que j’ai pour notre maître ont augmenté l’amitié que vous avez dès longtemps pour moi. Continuez-la moi, monsieur, je vous en supplie, comme à votre, etc.

40. — Le comte de Coligny à Bussy.
À Paris, ce 15 mai 1667.

Je vis hier chez madame du Bouchet et entre ses mains un caractère qui m’a toujours plu, mais qui me fut plus agréable que jamais par les marques de votre souvenir, qui m’est cher au dernier point[1]. Cela augmente la honte que j’ai d’être demeuré pour vous dans un si long silence ; mais je vous assure que la peur de ne pouvoir pas assez bien dire combien je vous aime et combien je vous honore, m’a empêché, plutôt que ma paresse, de vous écrire ; et de plus, il me semble que je dois être dans un certain état auprès de vous, que je n’ai pas trop besoin de vous faire souvent des compliments pour vous persuader que je suis à vous plus qu’homme qui vive. Par dessus tout cela je suis un peu glorieux. J’enrage que mon style et mon génie soient si fort inférieurs au vôtre[2], et je porte quelque

  1. Le passage auquel il est fait allusion n’a pas été imprimé.
  2. On sait qu’il a laissé des Mémoires qui ont été publiés par M. Monmerqué en 1844, in-8.