Page:Rabutin - Correspondance, t. 1, éd. Lalanne, 1858.djvu/11

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

blic, et le consultent comme un des maîtres de la langue. Flatté, comme il devait l’être, d’un pareil empressement, le comte fait face à tout et ne laisse jamais attendre ses réponses. Prose et vers abondent sous sa plume élégante[1], et sa causticité naturelle relève singulièrement les jugements qu’il porte sur les hommes et sur les choses.

Outre Bussy, qu’elle nous montre tout entier avec les qualités de son esprit et les défauts de son caractère, la Correspondance met en lumière des personnages plus ou moins oubliés jusqu’ici[2], et dont quelques-uns nous paraissent mériter d’être classés au nombre des excellents écrivains du dix-septième siècle. Nous placerons en tête madame de Scudéry, dont les lettres pleines d’élévation, de simplicité, de sentiment, respirent une mélancolie touchante et renferment des pages d’une exquise délicatesse[3].

Après elle, et pour ne parler que de ceux qui figurent dans notre premier volume, nous citerons madame de Montmorency, correspondante précieuse pour les anecdotes de la cour, surtout pour les anecdotes scandaleuses ;

  1. La plupart des vers de Bussy sont dirigés contre madame de Montglas, à qui il ne put jamais pardonner de l’avoir délaissé pendant qu’il était à la Bastille, et pourtant il lui était impossible de l’oublier, car il en parle à chaque instant dans la correspondance. Tous les torts peut-être n’étaient pas du côté de la marquise. Ce qu’il y a de certain, c’est que plusieurs des amies de Bussy, entre autres madame de Scudéry, prenaient sans cesse contre lui la défense de son ancienne maîtresse.
  2. Nous ne parlons, bien entendu, ni de madame de Sévigné, ni de Corbinelli.
  3. Nous signalerons, entre autres, celle où elle a tracé du P. Rapin un portrait qui est un vrai petit chef-d’œuvre. — Voy. lettre 383, p. 423.