Page:Rabier - Anatole, 1935.djvu/19

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Ma mère, poursuivit Toutenbec, partageant l’allégresse générale, sautait de joie pendant que je poussais un coin-coin sonore et joyeux pour fêter notre admission spontanée dans les faveurs royales.

— Bravo ! Bravo !  !… Vive Toutenbec, criait-on de toutes parts. C’étaient les auditeurs du caneton que ce récit avait émerveillés.

— Et comment, interrogea Anatole, se termina ton aventure ?

Anatole, en prononçant cette phrase était en proie à une sincère émotion.

— Hélas, répondit Toutenbec, les jours se suivent et ne se ressemblent pas. Notre entrée dans l’intimité du Roi suscita des jalousies sans nombre.

Le fermier qui voyait d’un mauvais œil le crédit dont ma mère jouissait auprès de Sa Majesté le Roi du Désert, lui tordit le cou et la pluma.….

Et me promenant près du soupirail, je fus amené à assister, impuissant, aux derniers moments de ma mère ; et c’est en respirant les fumées odorantes qui s’échappaient de la rôtisserie que je compris que j’étais définitivement orphelin…

— Pauvre Toutenbec, gémit Anatole, attendri.

— Pauvre Toutenbec, répéta l’auditoire avec un sanglot dans la voix et des larmes plein les yeux…

— Hélas, reprit le caneton, mes malheurs ne s’arrétèrent pas là… Ce n’était pas fini.