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asne, rouge par dehors comme grenades, lequel est tout plein de désirez, doubles ducatz, nobles à la rose, escuz au soleil et de toutes aultres especes d’or monnoyé, qui croissent dedans iceluy fruict, comme font les pepins dedans une grenade ou dedans une figue ou une courge.

Ledict fruict ne tumbe jamais de l’arbre jusques à ce qu’il soit meur. Il y en a aulcunesfoys de vereux qui ne sont pas de fin or, comme vous voyez les philipus, les florins et les aultres pièces de bas or.

Il estoit environ la my aoust quant nous arrivasmes par delà, qui est la saison que le fruyct est meur ; parquoy nous feismes monter l’ung de noz gens dessus l’ung des plus grans arbres qu’y fust pour le crouller et hocher, lequel le scouet si fort qu’il en tumba de si gros et en si grande habondance qu’ilz tuerent plusieurs de mes gens, tant estoient pesans et pleins de pièces d’or : car ilz estoient trop curieux et trop convoyteux de recueillir d’icelluy fruict. Les habitans du pays n’en tiennent non plus de compte que font les pourceaulx par deçà de poires molles. Quant ilz chéent de l’arbre sur la terre, ilz s’eschachent et ouvrent par pièces, comme font les figues quand elles sont fort meures, ou comme font les poyres molles soubz les poyriers ou figuiers. Nous les perceasmes du bout de noz espées et pongnardz, et les cousismes à noz jaquettes et à noz halecretz et hocquetons, plus prés l’ung de l’aultre et plus drus qu’es-