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du prédicateur. » C’est bien là le prêche qui avait lieu à huis clos dans les assemblées des novateurs.

Panurge perdit la plus grande partie de sa seconde oreille dans deux autres circonstances, où l’on reconnaît encore une allusion détournée aux pratiques religieuses de la Foi nouvelle : « Je crois bien que si j’eusse esté prebstre, dit Panurge, et que j’eusse confessé vérité (c’est-à-dire la religion de l’Évangile), qu’il ne m’en fust demouré (d’oreilles) plus qu’à mes compagnons. » Il invite donc ses lecteurs à se donner garde de tomber en telz inconveniens », et surtout « de rien debagouler (parler à l’étourdie, imprudemment), pour les dangers qui en peuvent advenir ».

Nous allons toucher rapidement différents points qui, dans le Disciple de Pantagruel, paraissent se rapporter à l’histoire du protestantisme, ou du moins à la guerre sourde des novateurs contre l’Église romaine. Dans son Prologue, l’auteur, en se proposant d’être le premier thresaurier de la Vérité, mentionne le vray prophète Ragot, dans lequel il faut reconnaître un des premiers apôtres de la Réforme française, ou Farel, ou Calvin, qui avaient été l’un et l’autre obligés de fuir et de se cacher pour se soustraire aux poursuites de la justice. Dans le chapitre III, Panurge, voulant avoir un bon truchement qui sût parler toutes les langues, l’envoie chercher en basse Bretagne et en fait venir un qui « parloit septante et deux langues ». Ce truchement pourrait bien être un des traducteurs de la Bible des Septante en français, soit Olivetan, soit Lefèvre d’Estaples, soit Calvin lui-même, soit le savant hel-