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des petits livres populaires écrits par Rabelais ou recueillis par quelqu’un de ses auditeurs, pendant le traitement des véroles et des gouttes, qu’il dirigeait à Lyon, après en avoir d’abord fait l’essai à Rouen, suivant le témoignage d’un autre opuscule qui ne peut être que de son invention : Le Triumphe de treshaulte et trespuissante dame Verolle, royne du Puy d’amour, composé par l’Inventeur des menus plaisirs honnestes (1539). Ces menus plaisirs honnestes n’étaient-ils pas les joyeux récits que Rabelais inventait pour ses malades ? Les critiques, trop sévères et trop difficiles, qui ont jugé le Disciple de Pantagruel comme une plate et insipide facétie, ne se souvenaient pas sans doute d’avoir lu, dans les Fables de Fénelon, le Voyage dans l’île des Plaisirs, lequel a tant d’analogie avec certains chapitres du Disciple de Pantagruel qu’on pourrait bien, sans reproche, comprendre Fénelon lui-même parmi les imitateurs de Rabelais.

Ce n’est pas faire grand tort à Rabelais que de l’accuser d’hérésie ou du moins de tendance vague et capricieuse aux opinions de la réforme évangélique. Ces opinions, qu’on appelait des nouvelletés, n’avaient encore, du moins en France, aucun caractère précis et déterminé. À l’époque où le Disciple de Pantagruel fut composé et imprimé, Calvin ne s’était pas séparé avec éclat des libertins qui appartenaient, comme Rabelais, Bonaventure Des Periers et Clément Marot, à la doctrine de l’Évangile ou de la Vérité, selon l’expression en usage, mais qui n’entendaient point se soumettre, sans examen, à de nouveaux dogmes religieux. On peut voir une allusion marquée à cet état timide et indécis de la