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prologve dv qvart livre.

la ville, requerant luy estre donnée audience, pour certain negoce concernant le bien public. A sa requeste fut silence faict en expectation d’entendre choses d’importance, veu qu’il estoit au conseil venu, qui tant d’années au parauant s’estoit absenté de toutes compagnies, & viuoit en son priué. Adonc leur dist : Hors mon Iardin secret dessoubz le mur est vn ample, beau, & insigne figuier, auquel vous autres messieurs les Atheniens desesperez hommes, femmes, iouuenceaux & pucelles, auez de coustume à l’escart vous pendre & estrangler. Ie vous aduerty, que pour accommoder ma maison, ie deliberé dedans huictaine demolir iceluy figuier : pourtant quiconques de vous autres & de toute la ville aura à se pendre, s’en depesche promptement : le terme susdict expiré n’auront lieu tant apte, ne arbre tant commode. A son exemple ie denonce à ces calumniateurs diaboliques, que tous ayent à se pendre dedans le dernier chanteau de ceste lune. Ie les fourniray de licolz. Lieu pour se pendre ie leur assigne entre midy & faueroles. La Lune renouuellee, ilz n’y seront receuz à si bon marché, & seront contrainctz eulx mesmes à leurs despens achapter cordeaux, & choisir arbre pour pendaige[1] : comme feist la seignore Leontium, calumniatrice du tant docte & eloquent Theophraste.


  1. Allusion à ce passage de la préface de Pline : « Ceu vero nesciam, adversus Theophrastum, hominem in eloquentia tantum ut nomen divinum inde invenerit, scripsisse etiam feminam, et proverbium inde natuna suspendio arborem eligendi. »