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chapitre li.


Christian. O Extravaguantes Angelicques, comment sans vous periroient les paouvres ames, les quelles ça bas errent par les corps mortelz en ceste vallée de misère. Helas quand sera ce don de grace particulère faict es humains, qu’ilz desistent de toutes aultres estudes & neguoces pour vous lire, vous entendre, vous sçavoir, vous user, practiquer, incorporer, sanguifier, & incentricquer es profonds ventricules de leurs cerveaulx, es internes mouelles de leurs os, es perples labyrintes de leurs artères ? O lors, & non plus toust, ne aultrement, heureux le monde.

A ces motz se leva Epistemon, & dist tout bellement à Panurge. Faulte de selle persée me constrainct d’icy partir. Cette farce me a desbondé le boyau cullier. Ie ne arresteray guères.

O lors (dist Homenaz continuant) nullité de gresle, gelée, frimatz, vimères. O lors abondance de tous biens en terre. O lors paix obstinée infringible en l’Univers : cessation de guerres, pilleries, anguaries, briguanderies, assassinemens : exceptez contre les Hereticques, & rebelles mauldictz. O lors ioyeuseté, alaigresse, liesse, soulas, deduictz, plaisirs, delices en toute nature humaine. Mais O, grande doctrine, inestimable erudition, preceptions deificques emmortaisées par les divins chapitres de ces eternes Decretales. O comment lisant seulement un demy canon, un petit paragraphe, un seul notable de ces sacrosainctes Decretales, vous sentez en vos cœurs enflammée la fournaise d’amour divin : de charité envers vostre prochain, pourveu qu’il ne soit Hereticque : contemnement asceuré de toutes choses fortuites & terrestres : ecstatique elevation de vos espritz, voie iusques au troizième ciel : contentement certain en toutes vos affections.