Page:Rabelais marty-laveaux 02.djvu/311

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
303
chapitre ix

(diſt Panurge) auoit doncques lanterné leur mere. Quelle mere (diſt le Poteſtat) entendez vous ? C’eſt parenté de voſtre monde. Ilz ne ont pere ne mere. C’eſt à faire à gens de dela l’eau, à gens bottez de foin. Le bon Pantagruel tout voyoit, & eſcoutoit : mais à ces propous il cuyda perdre contenence.

Auoir bien curieuſement conſyderé l’aſſiette de l’iſle & meurs du peuple Ennaſé, nous entraſmez en vn cabaret pour quelque peu nous refraiſchir. Là on faiſoit nopces à la mode du pays. Au demourant chère & demye. Nous preſens feut faict vn ioyeulx mariage, d’vne poyre femme bien gaillarde, comme nous ſembloit toutesfoys ceulx qui en auoient taſté, la diſoient eſtre mollaſſe, auecques vn ieune fromaige à poil follet vn peu rougeaſtre. I’en auoys aultres foys ouy la renommee, & ailleurs auoient eſté faictz pluſieurs telz mariages. Encores dict on en noſtre pays de vache, qu’il ne feut oncques tel mariage, qu’eſt de la poyre & du fromaige. En vne aultre ſalle ie veids qu’on marioit vne vieille botte auecques vn ieune & ſoupple brodequin. Et feut dict à Pantagruel, que le ieune brodequin prenoit la vieille botte à femme, pource qu’elle eſtoit bonne robbe, en bon poinct & graſſe à profict de meſnaige, voyre feuſt ce pour vn peſcheur. En vne aultre ſalle baſſe ie veids vn ieune eſcaſignon eſpouſer vne vieille pantophle. Et nous feut dict que ce n’eſtoit pour la beaulté ou bonne grace d’elle, mais par auarice & conuoitiſe de auoir les eſcuz dont elle eſtoit toute contrepoinctee.