Page:Rabelais marty-laveaux 02.djvu/266

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
258
prologve.

le ieune & clair Phœbus, si voulez. Mais tant grande feut l’exclamation de Couillatris, qu’elle feut en grand effroy ouye on plein conseil & consistoire des Dieux.

Quel diable (demanda Iuppiter) est là bas, qui hurle si horrificquement ? Vertuz de Styx, ne auons nous par cy deuant esté, præsentement, ne sommes nous assez icy à la decision empeschez de tant d’affaires controuers & d’importance. Nous auons vuidé le debat de Presthan roy des Perses, & de Sultan Solyman empereur de Constantinople. Nous auons clos le passaige entre les Tartares & les Moscouites. Nous auons respondu à la requeste du Cheriph. Aussi auons nous à la deuotion de Guolgotz Rays. L’estat de Parme est expedié : aussi est celluy de Maydenbourg, de la Mirandole, & de Africque. Ainsi nomment les mortelz, ce que sus la mer mediterranee nous appellions Aphrodisium. Tripoli a changé de maistre, par male guarde. Son periode estoit venu. Icy sont les Guascons renians, & demandans restablissement de leurs cloches[1]. En ce coing sont les Saxons, Estrelins, Ostrogotz, & Alemans, peuple iadis inuincible, maintenant aberkeids[2], & subiuguez par vn petit homme tout estropié. Ilz nous demandent vengeance, secours, restitution de leur premier bon sens, & liberté antique. Mais que ferons nous de ce Rameau & de ce Galland[3], qui capparassonez de leurs marmitons, suppous, & astipulateurs brouillent toute ceste Academie de Paris ? I’en suys en grande perplexité. Et n’ay encores resolu quelle part ie doibue encliner. Tous deux me semblent autrement bons compaignons, & bien couilluz. L’vn a des escuz au Soleil, ie diz beaulx & tresbuchans : l’autre en vouldroit bien auoir. L’vn a quelque sçauoir : l’aultre n’est ignorant. L’vn aime les

  1. Les habitants de la Guyenne s’étant révoltés contre la gabelle, on leur avait retiré leurs cloches en 1549. Rabelais n’avait garde d’oublier leurs réclamations, qui semblent fournir une suite au discours de Janotus à Gargantua.
  2. « Vilifiés, » dit la briefue declaration. Les commentateurs n’ont accepté ni ce texte, ni cette traduction, et veulent changer l’un et l’autre ; mais tous, même Régis, y perdent leur… allemand. Ce qu’il y a de sûr c’est que le sens réclame un mot opposé à invincible, et que vilifié, avili, est, à ce point de vue, fort satisfaisant.
  3. Galland venait de mêler Rabelais à leur querelle en écrivant en 1551, dans sa réponse à une harangue de Ramus (7e ft. vo) : « Melior pars eorum qui hasce nugas lectitant. Rame… non ad fructum aliquem ex iis capiendum, sed veluti vernaculos ridiculi Pantagruelis libres ad lusum & animi oblectationem lectitant. »