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le tiers livre.

spondres, & reïteroit ces mesmes parolles, les inuitant à combatre auecques luy. Mais les susdictz disoient. Der Guascongner thut schich vsz mite eim iedem ze schlagen, aber er ist geneigter zu staelen : darumb, lieben frauuen, hend serg zu inuerm haufraut.[1] Et ne se offrir au combat persone de leur ligue. Pourtant passe le Guascon au camp des auenturiers François, disant ce que dessus, & les inuitant au combat guaillardement auecques petites gambades Guasconicques. Mais persone ne luy respondit. Lors le Guascon au bout du camp se coucha pres les tentes du gros Christian cheuallier de Grissé, & s’endormit. Sus l’heure vn aduenturier ayant pareillement perdu tout son argent, sortit auecques son espée, en ferme deliberation de combatre auecques le Guascon : veu qu’il auoit perdu comme luy.

Ploratur lachrymis amissa pecunia veris,[2]

dict glos. de pœnitent. dist. 3. c. Sunt plures. De faict l’ayant cherché par my le camp, finablement le trouua endormy. Adoncques luy dist, Sus ho, Hillot de tous les Diables, leue toy : i’ay perdu mon argent, aussi bien que toy. Allons nous battre guaillard, & bien à poinct frotter nostre lard. Aduise que mon verdun ne soit poinct plus long que ton espade. Le Guascon tout esblouy luy respondit. Cap de sainft Arnault, quau feys tu, qui me rebelliez ? Que mau de taouerne te gyre. Ho sainct Siobe cap de Guascoigne, ta pla dormie iou, quand aquoest taquain me bingut estée.[3] L’aduenturier le inuitoit derechef au combat, mais le Guascon luy dist. Hé paouret, ïou te esquinerie ares

  1. Vieil allemand : « Le Gascon se flatte de se battre avec n’importe qui, mais il est plus enclin à voler : donc, chères femmes, veillez aux bagages. »
  2. « L’argent perdu est pleuré par de vraies larmes. » (Juvénal, Satires, xiii, 134)
  3. « Par le chef de Saint Arnaud, qui es-tu, toi qui me réveilles ? Quel mal de taverne te tourne ? Ho ! Saint Sever, patron de Gascogne, je dormais si bien, quand ce taquin m’est venu réveiller ! »