Page:Rabelais marty-laveaux 01.djvu/173

Cette page n’a pas encore été corrigée

toy. »

Quand tous furent esveillez, il dict : « Messieurs, l’on dict que matines commencent par tousser, et souper par boyre. Faisons au rebours ; commençons maintenant noz matines par boyre, et de soir, à l’entrée de souper, nous tousserons à qui mieulx mieulx. » Dont dist Gargantua : « Boyre si tost après le dormir, ce n’est vescu en diete de medicine. Il se fault premier escurer l’estomach des superfluitez et excremens.

— C’est (dist le moyne) bien mediciné ! Cent diables me saultent au corps s’il n’y a plus de vieulx hyvrognes qu’il n’y a de vieulx medicins ! J’ay composé avecques mon appetit en telle paction que tousjours il se couche avecques moy, et à cela je donne bon ordre le jour durant, aussy avecques moy il se lieve. Rendez tant que vouldrez vos cures, je m’en voys après mon tyrouer.

— Quel tyrouer (dist Gargantua) entendez vous ?

— Mon breviaire (dist le moyne), car — tout ainsi que les faulconniers, davant que paistre leurs oyseaux, les font tyrer quelque pied de poulle pour leurs purger le cerveau des phlegmes et pour les mettre en appetit, — ainsi, prenant ce joyeux petit breviaire au matin, je m’escure tout le poulmon, et voy me là prest à boyre.

— À quel usaiges (dist Gargantua) dictez vous ces belles heures ?

— À l’usaige (dist le moyne) de Fecan, à troys pseaulmes et troys leçons ou rien du tout qui ne veult. Jamais je ne me assubjectis à heures : les heures sont faictez pour l’homme, et non l’homme pour les heures. Pour tant je foys des miennes à guise d’estrivieres ; je les acourcis ou allonge quand bon me semble : brevis oratio penetrat celos, longa potatio evacuat cyphos. Où est escript cela ?

— Par ma foy (dist Ponocrates), je ne sçay,