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veilles, & se y cueilleroient facillement & y feroient leur ordure, & voila louvrage gaste & diffame. Mais voicy comme lon y remedroit. Il fauldroit tresbien les esmoucheter avecques belles quehues de renards, ou bons gros vietz dazes de Provence. Et a ce propos ie vous veulx dire, nous en allant pour soupper ung bel exemple. Au temps que les bestes parloient (il ny a pas troys iours) ung pouvre lyon par la forest de Biere se pourmenant & disant ses menus suffrages passa par dessoubz ung arbre auquel estoit monte ung villain charbonnier pour abattre du boys. Lequel voyant le lyon, luy getta la coignee, & le blessa enormement en une cuysse. Dont le lyon cloppant tant courut & tracassa par la forest pour trouver ayde, quil rencontra ung charpentier, lequel voulentiers regarda la playe, & la nettoyat le mieulx qu’il peust, & lemplyt de mousse, luy dissant, quil esmouchast bien la playe, que les mousches ne y cuyllassent point, attendant quil yroit chercher de lherbe au charpentier. Ainsi le lyon guery, se pourmenoit par la forest, a quelle heure une vieille sempiternelle ebuschetoit & amassoit du boys par ladicte forest, laquelle voyant le lyon venir, tumbat de peur a la renverse de telle façon, que le vent luy renversa la robbe, cotte, & chemise iusques au dessus des espaules. Ce que voyant le lyon, accourut de pitie, veoir si elle sestoit point faict mal, & consyderant son comment a nom ? dist. O pouvre femme, qui ta ainsi blessée : & ce disant, apperceut ung regnard, lequel il appella, disant. Compere regnard, hau ca ca, & pour cause. Quand le regnard fut venu, il luy dist. Compere mon amy, lon a blessé ceste bonne femme icy entre les iambes bien villainement & y a solution de continuité manifeste, regarde que