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confier à un ancien ami, Barnabé de Voré, des secrets d’importance, ne lui aliéna pas cette bienveillance, mais il dut rentrer en France au mois de décembre, pour empêcher l’affaire d’avoir des suites fâcheuses.

Au printemps, il est de retour à Turin, dans cette petite cour de Français italianisants, où François Errault, plus tard garde des sceaux, Guillaume Bigot, Claude Massuau, et surtout Étienne Lorens, seigneur de Saint-Ayl, sont pour lui des amis de tous les instants. Il ne quitte le Piémont qu’à la fin de l’année, lorsque Langey rentre en France pour aller rendre compte de sa mission à la cour (novembre 1541).

On passe les Alpes, on s’arrête à Lyon. Rabelais remet à l’imprimeur Sébastien Gryphe les Stratagèmes, c’est-à-dire prouesses et ruses de guerre, de Guillaume du Bellay, qu’il avait composés en latin et que Claude Massuau avait mis en français. Il surveille en même temps chez Juste la réimpression des deux premiers livres de son roman, dont il supprime les passages qui pouvaient lui attirer les foudres de la Sorbonne. L’anonymat, évidemment, était depuis longtemps percé : le médecin tourangeau de 1532, devenu maintenant un personnage et comme il le dirait lui même : « Monsieur du Rabelais » jugeait prudent de ménager les puissances. Faute d’avoir tenu compte de ces prudentes modifications dans une édition subreptice, Dolet s’attire la colère de l’auteur, et sous le masque de l’imprimeur se voit traité, par son ancien ami, avec une rigueur extrême.

Pendant que Langey reste à Paris, Rabelais va se reposer aux environs d’Orléans, au château de Saint-Ayl, où Étienne Lorens lui offre une plantureuse hospitalité. Il lit Platon, il écrit à ses amis d’Orléans, l’avocat Antoine Hullot, l’élu Pailleron, le savant Daniel, sans oublier Claude Framberge, scelleur de l’évêché, pour les inviter à venir déguster le vin ducru et les délicieux poissons de la Loire (mars 1542).

Cette vie charmante dure jusqu’au mois de mai, où vient le moment de regagner l’Italie. Plus que jamais Guillaume du Bellay a besoin de son médecin : sa santé chancelante va de mal en pis. En octobre, se sentant plus gravement atteint, le « bon seigneur » demande son rappel, et le 13 novembre