et à parfaite obéissance réduire. Le roi susdit, soi défiant de la fidélité du messager, ne lui répondit rien ; seulement le mena en son jardin secret, et, en sa vue et présence, avec son braquemart[1] coupa les hautes têtes des pavots là étants. Le messager, retournant sans réponse et au fils racontant ce qu’il avait vu faire à son père, fut facile par tels signes entendre qu’il lui conseillait trancher les têtes aux principaux de la ville, pour mieux en office[2] et obéissance totale contenir le demeurant du menu populaire. »
COMMENT PAR PANTAGRUEL NE FUT RÉPONDU AUX PROBLÈMES PROPOSÉS.
Puis demanda Pantagruel : « Quels gens habitent en cette belle île de chien ?
— Tous sont, répondit Xénomanes, hypocrites, patenôtriers, chattemites, santorons[3], cagots, ermites. Tous pauvres gens, vivants, comme l’ermite de Lormont, entre Blaye et Bordeaux, des aumônes que les voyageurs leur donnent.
— Je n’y vais pas, dit Panurge, je vous affie[4]. Si j’y vais, que le diable me souffle au cul ! Ermites, santorons, chattemites, cagots, hypocrites, de par tous les diables, ôtez-vous de là ! Il me souvient encore de nos gras concilipètes de Chésil. Que Belzébuth et Astarot les eussent concilié avec Proserpine, tant pâtîmes, à leur vue, de tempêtes et diableries ! Écoute mon petit bedon, mon caporal Xénomanes, de grâce. Ces hypocrites, ermites, marmiteux ici, sont-ils vierges ou mariés ? Y a il du féminin genre ? En tirerait-on hypocritement le petit trait[5] hypocritique ?
— Vraiment, dit Pantagruel, voilà une belle et joyeuse demande.
— Oui dà, répondit Xénomanes. Là sont belles et joyeuses hypocritesses, chattemitesses, ermitesses, femmes de grande religion, et y a copie[6] de petits hypocritillons, chattemitillons, ermitillons.
— Ôtez-cela, dit frère Jean interrompant. De jeune ermite, vieil diable. Notez ce proverbe authentique.
— Autrement, sans multiplication de lignée, fut, longtemps y a, l’île de Caneph déserte et désolée. »