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nouveaux embarras d’ambroise.

voir son oncle et de l’embrasser mille fois. La joie qu’il ressentait le tint éveillé toute la nuit, et, de grand matin, il heurtait déjà à la porte d’un notaire, demandant à grands cris qu’on le fît descendre pour une affaire très pressée. Celui-ci, croyant qu’on venait le chercher pour aller recevoir quelque testament, maudit mille fois et le métier qui le forçait à ne dormir que les yeux ouverts, et le mourant qui l’envoyait tourmenter, et le commissionnaire qui venait le chercher. Cette pensée n’occupait cependant que la portion de ses fibres intellectuelles destinée à veiller à l’intérêt de ses sens. L’autre partie de son cerveau, dès longtemps habituée à l’éclairer sur l’intérêt bien plus important de sa fortune, le poussa à se vêtir en diligence, dans la crainte qu’on n’allât s’adresser à certain notaire du voisinage dont il était jaloux. En un clin d’œil, il eut endossé une vieille robe de chambre, et, se précipitant dans l’escalier, il parut aux yeux d’Ambroise, un pied chaussé d’un soulier, l’autre d’une pantoufle et une grosse écritoire à la main. « Eh bien ! mon ami, qu’est-ce ? il est donc bien mal ! » — « Ah ! monsieur, plus mal que je ne puis vous dire ; sa situation me fend le cœur. Mon pauvre oncle ! quand pourrai-je vous voir tranquille ! » — « Pour un neveu, » lui dit le notaire, « vous voilà bien affligé. Et, dites-moi, l’avez-vous consulté ? » — « Moi, monsieur, le consulter ! Ah ! je veux qu’il l’ignore ; je veux le surpren-