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le vieux cévenol.

gens trouvèrent ce sermon d’une telle éloquence, qu’ils n’hésitèrent pas à faire ce que le commandant désirait ; mais un grand nombre d’entêtés fermèrent les yeux à la vive lumière qui brillait dans les arguments de ce missionnaire, et refusèrent de se convertir. Ce fut alors que la bride fut lâchée à tous ces convertisseurs, qui, pour le plus grand bien des hérétiques, les tourmentèrent avec autant de fureur que les démons tourmentent les damnés.

Nous ne pouvions ajouter foi à ce que nous racontait Ambroise des traitements dont il fut témoin, ou dont le récit était dans toutes les bouches. Tout était permis aux soldats pourvu qu’il fût dit qu’ils n’avaient pas tué leurs hôtes ; mais il leur était difficile de mettre d’assez justes bornes à leur zèle, pour conduire leurs victimes jusqu’aux portes du tombeau, sans les leur faire franchir. Ils entassaient violences sur violences. Ils versaient de l’eau bouillante dans la bouche des uns ; ils en étendaient d’autres tout nus devant le feu, ou leur faisaient ainsi tourner la broche ; ils faisaient tenir à d’autres des charbons

    envoyer des dragons vivre chez eux à discrétion ; que leurs femmes et leurs filles aimeraient mieux se convertir que de rester exposées aux outrages des soldats ; et que les protestants reconnaîtraient sans peine les vrais successeurs des apôtres, les vrais dépositaires de la foi de Jésus-Christ, dans les missionnaires qui marchaient à la tête des dragons. On ne trouve à la vérité, ni dans l’évangile, ni dans les épîtres des apôtres, aucun passage qui justifie cette manière de gagner les âmes.