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mort de la femme d’ambroise.

temps en temps nous voyons pendre les prédicants qu’on peut arrêter, et traîner des relaps sur la claie ; mais autrefois cela se voyait presque tous les jours. Ainsi, monsieur, vos plaintes sont fausses et frivoles ! » — « Que faites-vous de ces lois si vous ne les exécutez plus ? » lui dit Ambroise. « Nous les conservons, comme un monument respectable, dans les archives de la législation, et comme un modèle pour la postérité, auprès de laquelle nous ne pouvons avoir de plus beau titre. Nous les tenons en réserve pour les exécuter quand la fantaisie nous en prendra. Si malheureusement on venait à les révoquer, les protestants se livreraient plus que jamais à l’espoir d’une tranquillité qu’il serait absurde de leur accorder ; les exilés reviendraient dans leur patrie ; ils se jetteraient dans le commerce ou dans l’agriculture qui fleurissent déjà assez parmi nous ; et la postérité nous reprocherait avec raison cette faute grossière. Les protestants sont aussi heureux qu’il est nécessaire ; et si vous en exceptez la liberté de conscience, celle de leurs biens, la sûreté de leur état, la libre possession de leurs enfants, le choix des professions et des métiers, ils sont traités à peu près comme le reste des sujets. »

Les juges d’Ambroise se turent, parce qu’ils virent que tout le reste de la compagnie admirait le bon sens du vieillard. On convint qu’il n’y avait que le siècle de Louis XIV dans lequel