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mort de la femme d’ambroise.

convainquit personne, mais Ambroise perdit sa cause. On dit qu’en le condamnant ses juges se couvraient le visage de leur mouchoir pour cacher leur rougeur, et l’on voyait le combat qui se passait intérieurement entre le magistrat et l’honnête homme. Le magistrat l’emporta ; la mémoire de l’épouse d’Ambroise fut flétrie, et son fils déclaré illégitime et inhabile à succéder. On comprend quelle fut l’indignation d’Ambroise. « Retournons, » dit-il, « retournons dans cette terre d’hospitalité, où les droits de l’humanité sont respectés et conservés. Et toi, malheureux enfant, qui éprouves l’infortune avant de la connaître, viens chercher une patrie plus douce, et qui te permettra de recueillir les biens, que ma tendresse te conserve. »

Le soir, Ambroise soupa avec deux ou trois de ses juges. Ils convinrent de bonne foi que la loi qui l’avait condamné était en contradiction avec les lois éternelles de la nature et qu’ils avaient honte d’en être les organes. « Mais que voulez-vous que nous y fassions ? » lui dirent-ils « Nous ne sommes que les exécuteurs et non les interprètes de la loi. » — « Ce que je veux que vous fassiez ? » répondit Ambroise indigné : « je veux que vous fassiez connaître, au monarque que l’on trompe, l’abomination de ces lois que vous exécutez en son nom ; qu’il entende, de toutes les parties de son royaume, la voix des magistrats chargés de lui représenter tout ce qui fait